De l’autre côté, de Léopold Prudon

« De l’autre côté » est une bande dessinée qui aborde de plein fouet le sujet de l’immigration.

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Dessinée et scénarisée par Léopold Prudon, et publiée chez Les Enfants Rouges, elle constitue une sorte de fil rouge pour l’auteur qui a commencé sa conception alors qu’il était au lycée.

« Quand j’ai commencé à penser à ce projet, j’étais en terminale littéraire où j’étudiais l’Odyssée. J’ai regardé un documentaire d’Envoyé Spécial qui s’appelait Harragas Tunisiens et suivait le trajet d’un jeune clandestin, et j’y ai vu un lien avec l’œuvre d’Homère, une dimension universelle, romanesque, mythologique, comme un récit d’aventure tragique, et puis quelque chose d’anachronique aussi dans le fait de risquer sa vie pour traverser la mer, comme c’était le cas il y a deux mille ans, si bien que j’ai résolu de raconter cette histoire sous une forme moins documentaire que romanesque. »

De quoi ça parle ?

« De l’autre côté » nous narre l’histoire de Hamza, qui cherche à quitter la Tunisie. Ce pays ne lui parle plus, il ne le supporte plus malgré le changement qui s’annonce après les révolutions arabes. La décision est difficile, et pourtant il part laissant sa famille, ses amis et sa fiancée.

Tous sont perplexes : que cherche exactement Hamza ? pourquoi ne reste-t-il pas maintenant que la situation du pays va s’améliorer ? et pourquoi prendre autant de risque ?

Car le périple de Hamza ne va pas être un long fleuve tranquille : payer des passeurs, prendre un bateau et peut-être périr noyé, atteindre la France et se retrouver sans papier, être exploité par un grand magasin pour un travail rébarbatif à longueur de journée….

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Et pourtant Hamza s’accroche à un idéal, mais existe-t-il vraiment ? Qu’en est-il de toutes ses attentes et de sa volonté de croire en un monde meilleur ?

Et l’écriture dans tout ça ?

La bande dessinée se décline en planches en noirs et blancs. Ce parti pris renforce d’autant plus la solitude, les questionnements de Hamza et apporte également un côté inéluctable, tranchant et sombre au récit.

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Peu de texte mais les dialogues présents sont très parlants et font mouche.

A travers les aplats de noirs et de blancs, les personnes que rencontrent Hamza se confondent parfois avec lui-même : même profil, même tristesse, mêmes doutes. Cette volonté de l’auteur de faire se ressembler ses personnages à certains moments appuie le rapprochement de Hamza avec eux. Il est leur égal à certains égards : dans la galère, les difficultés mais à d’autres, il diffère complètement d’eux  : grâce à son côté un peu idéaliste et rêveur notamment. Sur la couverture de l’ouvrage on le voit ainsi représenté en blanc, sur un bateau, au milieu d’anonymes croqués en noirs : il lève la tête vers le ciel.

Qu’est-ce que j’en dis ?

Un beau récit, sombre, regorgeant de remises en question. Le parcours de Hamza est rude, il est à la recherche d’un autre soi, d’une nouvelle vie. La lecture se fait de manière très rapide mais il reste, une fois la bande dessinée refermée, comme un goût amer et une seule question : pourquoi ?

4/5

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6 réflexions sur “De l’autre côté, de Léopold Prudon

  1. Je suis très sensible à ce sujet et je pense bien que cette bande dessinée pourrait me plaire!
    Dans le même genre (mais pas tout à fait 😀 ) il y a la bd « les Mohamed » de Jérôme Ruillier qui raconte l’arrivée en France des premiers immigrés marocains. C’est une bd sublime!

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